Les bibliothèques de rue de Marie AUBINAIS

19.00CHF

Editions Quart Monde-Bayard. 166 pages. 2010

Catégories : , Étiquettes : ,

Description

Quand est-ce que vous ouvrez dehors ?

Pourquoi lire ? Pour inciter les enfants qui ne liraient plus à renouer avec l’écrit, comme on l’entend dire parfois ? Pour réhabiliter le livre menacé par l’image ou l’écran ? Contrairement aux idées reçues, « jamais aucune société n’a lu autant, jamais on n’a publié autant de livres ». Dans ce contexte, le manque de maîtrise de l’écrit constitue un véritable handicap. Malgré la scolarisation obligatoire, l’illettrisme touche aujourd’hui 9 % de la population française et reste statistiquement lié à la grande pauvreté. S’ajoutant à d’autres facteurs, il contribue à exclure radicalement de la vie citoyenne.

Initiées par le Mouvement ATD Quart Monde en région parisienne en 1968, les bibliothèques de rue visent à combattre l’exclusion en favorisant l’accès à la lecture et la rencontre entre personnes d’origines sociales différentes. Elles existent aujourd’hui dans de nombreux pays. Certes, depuis leur création, l’accès à la lecture a évolué : les bibliothèques municipales se sont multipliées, et des professionnels de la médiation culturelle vont au-devant d’enfants et de leurs parents grâce à des bibliothèques extérieures appelées « bibliothèques hors les murs », proches dans leurs pratiques des bibliothèques de rue. Mais l’offre de proximité est loin d’être généralisée et les publics en situation d’exclusion restent globalement peu touchés. C’est pourquoi les bibliothèques de rue d’ATD Quart Monde, et celles qui ont le même objectif, restent nécessaires.

Afin de guider et d’encourager ceux qui voudraient en créer, avec ou sans ATD Quart Monde, ou de répondre aux interrogations que pose la démarche qui les sous-tend, il est précieux d’expliquer le fonctionnement des bibliothèques de rue, de faire connaître leur impact à ceux qui, de près ou de loin, sont interpellés par la grande pauvreté et l’accès à la culture. Si les modes d’action mis en œuvre dès la fondation des premières bibliothèques de rue sont toujours en vigueur aujourd’hui, chacune d’elles doit cependant inventer sa manière d’être adaptée au contexte qui est le sien. C’est la raison pour laquelle ce livre fait la part belle aux témoignages.

Aboubakar, 9 ans, à qui l’on demande de définir la bibliothèque de rue répond spontanément qu’il n’aime pas lire, « parce que je ne lis pas vite, moi ». Après réflexion, il se ravise : « La bibliothèque de rue, c’est là où il y a des livres pour lire, là où il y a de l’air ; on peut y aller, venir lire, repartir. Et moi, j’aime bien les histoires. Quand on me les raconte, quand on me lit quelque chose, je pense, je lis dans ma tête… Non, en fait, je ne lis pas. C’est après que j’essaie de lire ce qu’on m’a lu, je prends le livre et je retrouve les mots. » Puis, Aboubakar poursuit : « En fait, j’aime bien lire, car les livres, ça fait perdre la tête. Et lire, c’est bien aussi pour l’école, pour avoir un bon métier. » Enzo, 8 ans, ajoute : « Avec la bibliothèque de rue, ce qui est bien, c’est qu’on a le temps, on parle et on se fait des copains », tandis que Marion, une animatrice, confie : « Je suis étonnée de l’incroyable potentiel des enfants, et je n’imaginais pas qu’ils vivent à ce point, aujourd’hui, une telle exclusion, eux et leurs parents. »

Les bibliothèques de rue sont tissées de rencontres et de moments magiques, qui n’ont rien de spectaculaires, mais qui disent que la culture et tout particulièrement le livre peuvent rassembler et agir en profondeur contre l’exclusion. Au-delà d’une action culturelle et sociale, préventive ou réparatrice à l’égard d’enfants très éloignés du livre et de la lecture, la bibliothèque de rue offre l’occasion d’être ensemble, tout en restant soi-même. Quiconque a connu le plaisir de partager un petit chef-d’œuvre de littérature enfantine, sur une couverture, dans la rue, avec un enfant qui le savoure autant que lui, peut en témoigner.

L’auteure, Marie Aubinais, journaliste et auteure de presse et d’édition jeunesse, est engagée depuis ses années lycée dans le Mouvement ATD Quart Monde où elle a participé au développement et aux activités de très nombreuses bibliothèques de rue.